La sociologie des guitounes a changé. L’influence de Guardiola est telle qu’elle a désormais inondé le foot amateur et ses stades champêtres. Résultat, des éducateurs parlent de half spaces à des gamins de 8 ans ou étudient les data de joueurs qui peinent à faire une transversale. Mimétisme risible ou moyen de tirer toute la pyramide du foot français vers le haut ? Pour y répondre, plongée au sein de la confrérie des Pep de District.
Autrefois, cela se passait sur un tableau Velleda avec des aimants à une heure du coup d’envoi, mais il faut bien vivre avec son temps. “Rappel sur notre animation défensive en bloc haut. Là, vous voyez leur espèce de 3-4-3 losange et notre 4-2-4 / 4-4-2. Un mouvement qu’ils ont souvent fait à l’aller. C’est leur défenseur central du milieu qui est venu se positionner comme central gauche (…). Et si l’ailier décroche, c’est au latéral de le suivre pour l’empêcher de se retourner. S’il estime que la passe est coupée, alors il doit rester avec les défenseurs dans l’alignement pour contrôler la profondeur. Si Naïm sent que ça va aller chez le relayeur droit, il va le serrer individuellement. Et si ça va là, c’est Kaïs qui doit se responsabiliser et sortir. À ce moment-là, Matteo resserre, Marvin resserre, Antho resserre, et ainsi on peut rester haut. En faisant ça, on doit les faire tergiverser (…), se rapprocher d’eux pour voler des ballons, finir et marquer.” Via un vocal WhatsApp d’une minute environ, illustré par des petits pictogrammes de couleurs qui s’agitent sur un terrain de football matérialisé en vue aérienne, Victor, 35 ans, Parisien exilé du côté de Marseille, vient de communiquer à ses ouailles le plan de jeu à adopter. Il préfère passer son samedi à transmettre sa compo et les grandes lignes stratégiques –attaque, défense, transitions et coups de pied arrêtés– de manière à ce qu’une fois arrivés au rendez-vous, “les garçons sachent déjà ce qu’ils ont à faire. On n’est pas dans la précipitation à devoir tout dévoiler en 20 minutes avant l’échauffement. La causerie d’avant-match se focalise simplement sur l’aspect psychologique.” Nous sommes au printemps 2024, à 24 heures d’un duel de haut de tableau face à Martigues et de ce qui reste aujourd’hui l’une des plus grandes satisfactions de sa jeune carrière d’entraîneur amateur. Sur le terrain, Kaïs s’est effectivement “responsabilisé” : le défenseur central est allé gratter un ballon hors de sa zone, et son pressing gagnant dans l’entrejeu a débouché sur un but de son équipe cinq secondes plus tard. Exactement comme son coach l’avait dessiné la veille sur son diagramme animé. “L’une des plus belles choses que j’aie vue de ma vie !”, s’enthousiasme-t-il, images à l’appui, puisque Victor a pris l’habitude de poser une caméra Veo sur un trépied les jours de match afin d’assurer la captation. “Maintenant qu’on a les outils technologiques, autant en profiter”, dit-il. Séances d’analyse vidéo hebdomadaires, étude de l’adversaire, abonnement à TacticalPad, un logiciel de planification tactique… Victor est extrêmement méticuleux. La dimension échiquéenne du ballon le passionnait before it was cool, preuve en est son blog tactique, Première Touche, l’un des pionniers du genre à avoir envahi la Toile (voir So Foot n°195). La récupération haute initiée par la sortie de son central sur